samedi 25 janvier 2014

# Mort

En ce samedi 25 janvier s'achève la fabrication du biopic d'Elisabeth Ambrose. 

Ce soir, au Centre Pompidou, Forum -1, le plateau de tournage, les ateliers, tout sera démonté.

Elisabeth existe, désormais, elle existe et c'est déjà pas mal. 
Ce qui chante par sa plaie, seuls les contributeurs en connaissent l'origine pour l'avoir inventé. Quelque chose de secret et qui fait un peu mal. 

D'ici la fermeture, épitaphe à la greffe.

Elisabeth Ambrose mourra le 1er novembre 2015.


                                                       *

       La toute dernière image que ses yeux captent : c'est quoi? 

vendredi 24 janvier 2014

# Hors Pistes : deuxième trace

# Retraite

Il existera un refuge, il existe toujours un refuge, y compris pour les apatrides. A condition que leur dictionnaire soit relié en peu de grenouille. 

Elisabeth ne bat pas en retraite, elle ignorera d'ailleurs tous les sens de ce mot. Elisabeth s'infiltre, elle ne se heurte à rien, mais presque tout la blesse. C'est pour ça qu'elle se venge, Elisabeth, élément Air, l'haleine de Némésis et la bouche de Lilith. 

Ce soir Elisabeth s'imagine vieille, pour rire. 
Elle a les doigts noueux, douloureux aux jointures.
Ses cheveux sont plus longs, leur roux est d'un jaune sale.
Ce soir, à la chandelle, personne ne l'a célébrée, a-t-elle su être belle, ce soir Elisabeth se pose les questions types. Le bonheur, c'est simple comme. Qu'ai-je fais, dans quel Etat, à quoi ça a servi, qu'ai-je tenté de modifier. Ce soir Elisabeth est vraiment fatiguée.

Elisabeth s'endort, le canapé est mauve, l'immeuble silencieux. Elle gravit toute seule l'escalier, prend au rond-point à gauche, longe le bassin, traverse les couloirs et le parc. Sous le vieux chêne un philosophe roumain et décédé l'attend.

Les oreillers, la couette, par terre. Elisabeth en sueur, il fait jour depuis peu, sur la table de chevet, le carnet est ouvert. Elisabeth cette nuit a noté très précisément : 


"Je veux mourir, mais je regrette de le vouloir". 



jeudi 23 janvier 2014

# Engagement

Elisabeth s'engage, elle veut voir du pays. 

Ses pensées, ses souvenirs, les traces de son parcours; une fabrique en vitrine, approchez, dans sa tête des tiroirs ont poussés.

Elisabeth a 26 ans, modifier le réel, pour que ce soit possible, elle pense que la magie peut être une solution. 

Elisabeth s'engage, elle rejoint La Sibylle.

La nuit, elles ne dorment pas mais leurs paupières sont closes. Sur la table de chevet, un carnet, deux plumes d'oie, un papillon et des fleurs bleues, une plaquette de Stilnox, une lime à ongles et le cadavre de deux ou trois ratons laveurs. 

Elisabeth et La Sibylle pratiquent le rêve lucide. Ensemble elles montent les marches de l'escalier de verre. Puis, chacune se débrouille. Parfois elles se donnent rendez-vous dans un jardin qu'elles croient public. Elles s'attendent toute la nuit en vain. Elisabeth chante sur un banc, La Sibylle se transforme en quelque chose qui pique. Au réveil, elles sont tristes et ont un vilain teint.

Elisabeth s'engage. Pratiquer la magie comme un service public. Le Parti du Cercle, en France, janvier 2014. Demander, c'est obtenir. Elisabeth, Élément Air, une formule de communication, ce que chacun doit demander, de soi-même quoi exiger. Elisabeth s'engage. En commençant toujours par répondre aux questions. 

C'est pour ça que le vent est si humide cette nuit. 



mercredi 22 janvier 2014

# A présent, vous êtes le héros

A défaut de sauver le Monde de l'Apocalypse, on va déjà essayer de sortir le pays de la Crise. 

Elisabeth est venue en suivant une nuque blonde, depuis elle l'a perdue et ne sait pas ce qu'elle fait là.

J'ai une super formule pour relancer la croissance. Le problème c'est que je ne maîtrise pas le sumérien, et comme j'ai pas Facebook c'est ultra compliqué. 

Elle ne sait jamais ce qu'elle fait, Elisabeth Ambrose, 26 ans, ci et là se déplace mais ne décide jamais. De rien, et pour personne, surtout pas pour elle-même. 

La question c'est : est-ce qu'on fonctionne comme une secte à but non lucratif, ou est-ce qu'on doit monter une association type loi 1901? 

Elisabeth comprend qu'il se passe quelque chose. Elle appelle qui elle peut, alors vous la rejoignez.

Les pavés, la courette, la loge, sûrement une loge, enjamber les tulipes, après cent mètres à gauche, fenêtre sur bégonias, vous êtes arrivés.

Elisabeth ne vous voit pas, vous êtes et resterez étrangers l'un à l'autre, que personne ne se fasse d'idée. Elisabeth, comme vous, saisit quelques échanges; des filles peignent des banderoles avec du sang de pigeons. 

Modifier le réel est devenu impossible : pratiquer la magie est la seule solution. 
Liberté, volonté, sororité. 
Magie pour tous !
Ensemble, exorciser les cerveaux du spectre de Thatcher est possible.
Le talisman, c'est maintenant !
Il existe une alternative : il suffit de la formuler.
Le Parti du Cercle : mieux que l'indignation et les jeux en réseaux.
Tout placard à balai séquestre sa sorcière.

Elisabeth ne vous voit pas. Elle tente de comprendre où elle est, et pourquoi ci et ça, il se passe trop de choses, elle aimerait s'intégrer, sans trop savoir pourquoi. Enfin si, elle le sait. Elle s'ennuie. Tout le temps, elle s'ennuie. Ici, il y a Le Parti du Cercle, une femme en kimono, les grains d'encens sont noirs et les bougies violettes. La femme, elle s'appelle comme elle veut, du coup, cette fois, c'est La Sibylle. 

La Sibylle, dans l'histoire, c'est l'Oracle, la Maîtresse du Jeu. Elle voit de temps en temps, sait lire, parle beaucoup, et chante aussi, malheureusement. La Sibylle est nomade, elle se promène en France, retournera en Italie. 

Vous voici devant la Sibylle, Elisabeth profite de votre inattention, elle se faufile, hop, c'est son tour.

La Sibylle ferme les yeux. Dit : L'ange qui parle par ma bouche a une voix de grenouille. Elisabeth est déstabilisée. La Sibylle est très solennelle, son costume de cérémonie, de près, les broderies, c'est un sacré truc. Elisabeth, ça l'impressionne. Vous, nettement moins. La Sibylle, en fait, c'est juste Chloé Delaume en kimono Dévastée et même pas en duo avec quelqu'un de connu. 

Elisabeth entend l'ange envahir sa tête, les syllabes nénuphars, comment écrire l'étang, dis-moi petit golem, quel goût a ton limon; es-tu, mon enfant satisfaite, c'est ce qui résonne dans sa tête, combien de princes, et de princesses, quels baisers, quels soupirs, combien de lunes passées sans le chant des grenouilles. 

Elisabeth ne vous voit pas. Et vous n'entendez rien du festin des grenouilles. Par contre, le long silence, sa blancheur à faire mal, les lèvres d'Elisabeth qui soudain ne tremblent plus. Vous vous en souviendrez peut-être. 

Elisabeth a répondu : Je veux être ma vraie nature.

C'est ensuite, et seulement ensuite, que les ennuis ont commencé.


                                               *

                                C'est à vous de répondre : 
                                Si Demander, c'est obtenir. 
                             Une question : que demandez-vous? 


# Grève / Rêve

Elisabeth est devant moi. Tout du moins, semble-t-il.

Je pense qu'elle sait que je ne l'entend pas, sa voix ne s'est toujours pas imposée. Elisabeth n'a dans la bouche aucune expression, aucun tic de langage. Elle a n'a pas de larynx, parce qu'elle n'a rien à dire. C'est une supposition. 

Je pense qu'elle sait ce qu'elle risque, Elisabeth Ambrose, si elle se retrouve muette dès le début de l'histoire. Je n'accueillerai pas sa parole, et me lasserai très rapidement de devoir décrire ses gestes. 

Personnage de fiction, Elisabeth, une parmi d'autre. 
Mais ici : une seule narratrice.

Elisabeth devant moi, ce qu'elle voit, elle, c'est l'autoroute, l'aire de repos, le poteau, la grille ou la balance, le mois d'août, ses pupilles. Elisabeth est rousse, faite de lait et de son. Quand viennent les équinoxes, ses yeux changent de couleur. 

Elisabeth a vingt-six ans, maintenant sa vie va commencer. Sa vie de personnage dénué de toute ambition. 

Je suis la narratrice, je fais ce que je peux avec le matériel livré. Je raconte, moi, c'est tout. L'auteur est bien gentille, avec ses grandes idées d'atelier de fabrication d'un personnage de fiction où plein de gens participeraient parce qu'ils n'auraient que ça à foutre. D'ailleurs l'auteur, ce qu'elle fait ce soir, pendant que je me farcie le boulot, ce qu'elle fait l'auteur pendant ce temps-là, je vous le demande. 

Par conséquent, je récapitule. Je suis la narratrice, Elisabeth Ambrose, je connais son avenir, c'est dans mes compétences. Je saisis son présent par de très légers flashs, son passé, qu'en est-il.

Peut-être qu'il est possible de faire brûler les morts, les maisons, les familles, les totems, les bourreaux. De récupérer les cendres, de les mettre dans une boîte parfaitement hermétique. Je suis la narratrice, je me pose des questions et parfois je me fâche. Les cendres je les mélange avec de l'huile de truffe et un peu de paprika, on n'a jamais fait mieux pour relever le rôti de porc. 

Je suis la narratrice, je ne me rends pas bien compte de ce que signifient concrètement, les mots estomac et ulcère, ceci étant je n'éprouve pas de honte à devoir juste l'imaginer. Ce n'est pas dans mes fonctions, de ressentir par la chair. Sinon jamais je n'aurais pu décrocher ce poste. 

Il y aura un long silence, et puis à ce moment-là, je ne sais pas pourquoi, à force de traumas, de valses autour des marronniers, d'automnes séniles, enfin. Bref. Je sais pas. Un long silence, et puis je suis rentrée de force.

Moi, c'est Elisabeth. Elisabeth Ambrose, 26 ans.

Je vais ouvrir une porte, et vous allez me suivre.


mardi 21 janvier 2014

# Récapitulatif

Vendredi.
Même kimono, cotonneux beige losanges pour tous les invités. 
Tabou & phobie, se mettre à table. 
Question : avec ce thème, que va-t-on nous servir. 
Je redoute les quenelles de Cthulhu, les insectes frits, le mauvais goût, l'écueil, sa crème.

En face de moi, toute en boucles une jeune femme nous savait épargnés de tout tabou gustatif : "Ils ne peuvent pas nous servir de la viande d'humain". Ensuite elle nous a chanté Les conseils de la Fée des Lilas devant une soupe aux moules.

Parfois ce que je préfère, c'est de ne rien inventer.


Samedi.
L'échec pour thème. 
Je prends Elisabeth, j'oublie beaucoup tout le reste et je récapitule.
Je pense au mur de pierres dans le fond du verger. 
Je pense au carnet de rêves que je tiens en ce moment.
Au mur de pierres qui a poussé entre le pré et la colline.
Chaque nuit, même pré, même colline; nouvelles pierres.
Une aporie me mange le ventre depuis qu'Elisabeth est née.


Dimanche.
Désir, disent-ils. 
Du lever au coucher en moi seule la migraine s'exprime car elle fait corps. Moi, je ne sais plus tellement.

Lundi.
Lundi je ne dors pas, j'ai juste dans le cerveau une bouillie d'hémisphères; la codéine, les baumes, le silence comme les prières, tout reste inefficace.
Pendant que je maudis sur douze générations les responsables de la suppression du Di-Antalvic, Elisabeth s'enfuit au Forum-1 du Centre Pompidou. 

Elisabeth est rousse, si je la laissais faire, elle aurait les organes totalement déchiquetés. 

Le thème d'Hors Pistes lundi 20 janvier : Le temps / L'ennui.

Le mardi, c'est le jour de relâche, mais pour moi ça se trouve aujourd'hui.

Elisabeth attend son heure, mercredi : grève : rêve.

Nuit de mardi à mercredi, Elisabeth je l'écris ailleurs, dans le livre qui prend forme à côté de tout le reste. Il faudra bientôt que je récapitule. J'oublie, à force de ne pas inventer.

Je ne vais pas dormir, non, je vais juste rêver. Elisabeth, un rêve de pierres, mortels, vos genoux vont plier. Nuit de mardi à mercredi, Elisabeth m'a mangée crue, je n'étais pas très prêteuse, j'ai compris la leçon. Il est possible que j'exagère. Que je lui sous-loue pour une fortune un recoin insalubre de mon cerveau. 


jeudi 16 janvier 2014

# Tabou / Phobie

Vendredi 17 janvier, matin, très tôt, dans quatre heures je participe au Biopicnic Forum-1. 

Aujourd'hui, le thème du déjeuner, c'est le Tabou. 

J'ai choisi le Tabou, parce qu'en consultant le programme, à part la Mort et l'Echec, j'avais peur de ne pas quoi savoir dire à table. Je ne comprends pas bien ce qui m'attend dans quatre heures, ce que me réservent Meggie Schneider et Simon Fravega au Forum-1 du Centre Pompidou.

Je consulte la page Wikipedia du mot Tabou, parce que je ne sais plus où j'ai foutu Le Petit Robert

"Tabou est un mot que l'on retrouve dans toutes les langues polynésiennes sous la forme tapukapu... Il fut popularisé en Europe par James Cook au retour de sa première circumnavigation durant laquelle il séjourna à Tahiti. Il désigne, dans la littérature ethnologique, une prohibition à caractère « sacré » dont la transgression entraîne un châtiment surnaturel. En tahitien entre autres, le contraire de tabou se dit noa, ce qui est ordinaire, accessible à tous.
Par extension, le terme tabou désigne, dans son acception la plus générale, un sujet qu'il est préférable de ne pas évoquer si l'on veut respecter les codes de la bienséance d'une société donnée."

Je ne comprends pas bien ce qu'on attend de moi dans quatre heures, attablée avec combien d'autres, filmés par deux artistes au Forum-1 du Centre Pompidou. Le Maître de Cérémonie va prendre en charge le protocole. J'ai fait exprès de ne pas me renseigner, de n'être au courant de rien, d'entrer dans le décor en facilitant la fermeture de la boîte. 

J'ai choisi le Tabou. De quoi on va parler à table, je commence à me poser des questions. Le Tabou, fabrication d'un film, artistes, au Centre Pompidou. Dans un dispositif qui produit, capte, provoque la fiction comme les réactions. 

Le Tabou, dans ce dispositif, assise à table, ignorante de tout protocole, j'interagis assiste participe. Rayer les mentions inutiles; laisser poursuivre Wikipedia. 

"Tabou, EXEMPLES :
  • La maladie (en particulier le sida ou le cancer) et la mort ;
  • Les odeurs corporelles, les excréments, le manque d'hygiène dans les lieux publics ;
  • La sexualité et le désir, notamment dans leurs formes jugées déviantes, tels l'inceste dans les sociétés traditionnelles, la pédophilie, le viol voire l'homosexualité dans les sociétés modernes;
  • L'argent et la mendicité ;
  • L'affaire Dreyfus, à la fin du xixe siècle ;
  • La Commune de Paris, à la fin du xixe siècle et début du xxe siècle ;
  • Le nazisme et les faits s'y rapportant, par exemple la collaboration durant l'Occupation allemande ;
  • La critique de la religion.
  • Certaines maladies psychiatriques (trouble de la personnalité paranoïaque et états délirants, notamment)."

J'espère que tout le monde sera poli et que personne ne parlera de bave, de sécrétions corporelles, ni d'excréments. Et qu'il n'y aura pas de pervers narcissiques ergotant ad lib.  sur la sexualité et le désir. 


La maladie et la mort, je gère. Mais je ne suis pas certaine d'être autant mobilisée sur la question de l'argent et de la mendicité. Pareil pour l'affaire Dreyfus, La Commune de Paris, l'insurrection qui ne vient qu'entre la terrine bio et le brie, j'ai sûrement commis un impair, il reste quelques heures, le tabou quel sujet quelle idée, trop tard, dommage pour moi.

Le tabou, le sujet à table, au dessert : le nazisme, les faits, la collaboration, l'occupation, la critique, la religion. Hiver 2014, la cendres des étoiles jaunes, dans le chaudron les dissoudre à coup de fruits exotiques. Assister aux troubles publics, dévorations paranoïaques et Etat délirant. La confiture à l'amnésie, sa recette, une tarte à la crème.

Vendredi 17 janvier 2014, à midi Biopicnic, l'expérience pourrait s'avérer, d'un point de vue psychiatrique, un facteur déclenchant. Surtout s'ils servent de la salade de poulpe pendant qu'autour de la table s'agitent des enfants en bas âge. 






# Quotidien

Forum-1 chaque jour, même espace même table même rituels, ils déjeunent à midi, combien de convives de plats de parole. Ils filment le réel, Meggie Schneider et Simon Fravega. Dans une boîte, du vivant au creux de leur atelier. 


Elisabeth Ambrose, je ne sais pas. Parfois je ne me rends qu'en ma vie minuscule. Si minuscule. Souvent, moi-même, je la perds de vue. 

Hors Pistes à Pompidou, et moi derrière l'écran, combien, question, pluriel. 
J'habite un corps dont les organes n'excèdent que très rarement 140 caractères. 

Elisabeth Ambrose, je dois la fabriquer quoi qu'il advienne, j'ai besoin d'elle, je l'ai nommée, l'auteur invente son héroïne. Elle coud le corps d'abord pour le remplir après. Elisabeth Ambrose, couche après couche, la glaise en states, dans ma chétive golem, l'atelier est ouvert, messieurs dames faites tourner. Je suis bien obligée d'être la narratrice, celle qui prend la parole pour la redistribuer.

Hors Pistes, Centre Pompidou. Sur ce blog essayer un truc, peut-être qu'Elisabeth, elle peut se débrouiller toute seule d'ici une nuit ou deux. 


                                                                  *


D'ici là l'exercice, c'est d'écrire un court texte qui commence par : 


                             "L'hiver 2014, tu sais, je m'en souviens."
                              

mercredi 15 janvier 2014

# Amour

Au Forum-1 aujourd'hui, Meggie Schneider et Simon Fravega ont pris pour thème du biopic-nic : l'amour. 

L'expérience n'a que quelques jours, Elisabeth Ambrose, personnage de fiction, une vie parmi tant d'autres, fabrication ouverte, atelier accessible. 

Celle qui parle, il faudrait bientôt que ce soit elle. Pourquoi pas là, tout de suite. Elisabeth Ambrose, lentement prend la parole. 26 ans, plein hiver. Pour thème ce jour, l'amour.

Je suis Elisabeth et j'ai besoin de vous. Mon cœur est encore vide, je ne sais pas qui aimer. Partenaire idéal, un homme ou bien une femme, caractères et profils, points communs et listing de complémentarité. 





lundi 13 janvier 2014

# Émancipation

Elisabeth Ambrose, elle aimerait bien dire Je, mais pour l'instant, elle sait juste invoquer.

Elle ne sait pas vraiment à qui elle s'adresse, d'ailleurs. Du coup, elle écrit des chansons au milieu des pièces dévastées. La chambre d'Anna, la salle de classe, aucun double vitrage n'a jamais résisté. 

Elisabeth Ambrose, elle est célibataire, personne ne peut l'écouter, rien que de l'entendre le sang se givre. 

Elisabeth Ambrose, une nuit une femme lui dit : ta voix est une banquise. 

Elle déposé sur sa langue un minuscule de carré de papier buvard rose, la femme de cette nuit-là, elle l'a fait, loin de la chambre d'Anna, des salles de classe et des balcons qui se fissurent au fil des hivers. Elisabeth aimerait pouvoir raconter l'anecdote toute seule. Elle a le souffle court quand il s'agit de parler. 

Au début, elle voulait juste fuir. Elle aurait préféré l'invisibilité, la téléportation, la télékinésie, limite, c'est plus discret. Ce qu'elle souhaitait, c'était partir. En arrêtant le temps ou en s'évanouissant, son vœux, à la base, c'était ça.

Elisabeth n'aime pas qu'on l'appelle Mademoiselle, elle a dix-sept ans dans deux mois, elle enregistre ce souvenir : 

Sa vue lentement se brouille; exigence des pupilles; avidité, éponge, presser : voici le flou. 

Maintenir le flou, pour qu'il deviennent de l'air qui s'élève et qui gifle; qui trouble en tourbillon la netteté du réel.

Elisabeth, elle se concentre, peu à peu elle comprend, accepte tout d'abord le don comme une inédite compétence. Elle ne veut pas admettre qu'elle est l’Élément Air. 

Elisabeth a pris un train, elle a marché longtemps, s'est perdue quelques mois, est revenue à la vie. Au centre du terrain vague, un corps éphèbe et mâle pourrit très doucement. Un cahier déchiré, des confettis de mots mélangé à la terre. 

L'adolescence n'est désormais qu'une suite de verbes à l'imparfait.

Elisabeth Ambrose, elle aimerait bien dire Je. 



 *

                                                     Elisabeth dit : Je. 

Vous avez 24h pour lui remplir la bouche.

*

Expressions propres,tournures de phrases, tics, cheminements de pensée: matériaux qui feront sa voix. 



dimanche 12 janvier 2014

# Découverte / Premières fois

Reprenons.


Elisabeth Ambrose est née Latitude 48N50, Longitude 2E20; elle est Balance ascendant Lion, signe solaire prémédité. On pourrait ici insérer la capture argentique de ses tâches de rousseurs. Le blé et l'orge, n'est-ce pas. Dans le miroir, son teint laiteux, chaque matin lui donne la nausée.

Elisabeth pense à sa soeur, à l'odeur de la peur incrustée au coton. Elisabeth pense à leur père, à sa peau, au magma, au chant de la grosse pierre. Elle ne se souviendra pas de ce qu'il s'est passé. 

Elle ne se souvent que de l'air. Il était frais, un peu musqué, efficace comme un vers d'oreille. Une brise qui se cabre d'un coup à l'orée du refrain. La poussière s'est levée, informe, mais aveuglante. 

Le prénom de sa soeur, elle cherche à l'oublier. Comme sa mère qui pleurait. Ma fille est une sorcière j'ai reproduit l'Enfer, c'est ça qu'elle répétait en s'arrachant les cheveux. Sa mère, elle voudrait s'en souvenir, juste un très bon souvenir, plus tard, à l'occasion. Peut-être que ce n'est pas important. Qui sait. Elisabeth doit être patiente, de toute façon, elle n'a pas le choix. 

Elisabeth a peur du noir, déteste qu'on lui lise des histoires, mais davantage encore qu'on raconte la toucher. Une fois, elle s'est mise en colère. La tapisserie s'en est ressentie, de même pour tout le mobilier. Ca a un peu gâché la fête. 

Elisabeth ne mange plus de criquets. Ca lui faisait vomir des grenouilles, une fois scolarisée elle a du renoncer, un peu comme s'énerver en boums. 

Elisabeth a vingt six ans. Elle se dessine doucement, pour l'instant très doucement. Elle ferme sûrement les yeux. Le fauteuil à oreilles est aussi à bascule. 




samedi 11 janvier 2014

# Enfance


Elisabeth Ambrose est vide, pour l'instant c'est juste une enveloppe. Un nom et corps mince, quelques taches de rousseurs, c'est absolument tout. Née de père et de mère, quelque part, oui mais où. Son premier souvenir, ce qu'elle voit de son lit, ce qu'elle entend derrière la porte, quelle forme donner à sa madeleine. 

Transposez vos propres souvenirs, ou inventez-en lui. 
Ecrivez un fragment de sa vie minuscule au creux des commentaires, ce blog fonctionne comme ça.

Elisabeth Ambrose peut être un petit peu vous et tant d'autres à la fois. Je sais qu'elle aime le vent, la tempête et les courants d'air. Le reste, c'est à vous de voir, personnage collectif, Elisabeth attend, un peu triste d'être floue, ce serait bien d'y remédier. 


vendredi 10 janvier 2014


Du 10 au 26 janvier, HORS PISTES propose sa Biopic's Factory au Centre Pompidou. Chloé Delaume, écrivain et personnage de fiction, propose dans ce cadre une expérience littéraire collective.





           Ici se tient un Atelier de Fabrication d'un personnage de fiction : 
       Elisabeth Ambrose a 26 ans cet hiver, à vous d'écrire son biopic.

Mode d'emploi : Chaque jour, une thématique et quelques instructions. Par le biais des commentaires, composez un souvenir, un fait, un événement.